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Biographie de Youness

"Plus de 60 % de la population du monde arabe a moins de trente ans. Youness fait partie de cette jeunesse férue des réseaux sociaux Internet, manipulatrice de toutes les applications Web sur son téléphone portable, nourrie d'infos en continue d'Al Jazeera, la CNN qatarie, audimat des télés occidentales, premier public des reality shows et autres concours musicaux où l'on devient star en quelques jours. Youness El Guezouli vient de là. Il a été révélé au public du Maroc en 2003 en remportant Casting Star, la Star Academy marocaine. Il est d'une jeunesse qui prouve qu'elle ne prend pas le virtuel pour la vraie vie mais s'en sert pour changer son destin, écrire son propre mektoub à vingt-sept ans.

A ceux qui présentent souvent cette jeunesse comme peu attachée à sa patrie parce que tentée par l'émigration, Youness répond dès le début de cet album par Bledi bledi (mon pays mon pays) : « Je visite tant de pays mais n'oublie jamais le mien/Aujourd'hui je suis heureux car je pars te retrouver mon cher pays/L'un des plus beaux du monde/Je tiens dans ma main l'étendard rouge pour le déployer/Le Maroc est mon pays ». La chanson commence par des accords qui rappellent les ouvertures douces du chaâbi algérien avant d'être emportées par la frénésie de son homonyme marocain, appelé aussi chaâbi, le terme signifiant en arabe « populaire ». Il faut dire que Youness est actuellement Strasbourgeois ; la métropole alsacienne renferme l'une des plus grandes communautés marocaines de France. Il dit son blues du déracinement sur un tempo mené par violon et derbouka dans Ramdane : « Celui qui est loin de ses proches/Comment passe-t-il le ramadan/Comprenez ma souffrance/Etranger exilé je suis seul/Et ne connais pas la tranquillité ». La nostalgie du bled et la débrouillardise, deux aiguillons de l'immigration sont exaltés dans Nsabar galbi (je patiente).
Youness a rencontré l'Hexagone à noël 2004 en quittant Meknès où il a grandi après sa naissance le 11 avril 1983 à Fès, la rivale. Deux anciennes capitales impériales du Maroc qui irriguent son inspiration, Meknès dépositaire de l'un des plus puissants ordres mystiques et musicaux du Maghreb, celui des Aïssawas, et Fès, la plus importante métropole nord-africaine de l'art arabo-andalou. Violon, percussion, une touche pop, Youness chante cette musique de cour et d'artisans, héritée de l'Espagne musulmane, avec Allah yatik basbar : « Que Dieu te donne patience comme j'ai patienté moi/O toi celle au grain de beauté/ Viens à moi toi qui es mon âme et ma sérénité/Rien que toi et moi ». Il n'oublie pas une autre culture puissante du Maghreb, la musique gnawa des descendants des Noirs africains qu'il transforme en fête pop dans Salama tout en déplorant une jeunesse passée.
Issu d'une fratrie que six enfants, Youness a été élevé dans une famille de mélomanes où il poussait de la voix dès l'enfance. « J'écoutais ma mère qui n'arrêtait pas de chanter dans la cuisine », explique-t-il pour dire sa vocation. Comme tout bon Méditerranéen, il loue sa mère, Memti : « Petite maman/Toi au cœur pur/A la chaleur protectrice/Si je t'ai fait souffrir pardonne-moi/Je suis ton fils et cela est mon destin ». Il mène son ode sur un rythme émouvant inspiré de la chanson moderne née à Oran, le port algérien, au croisement des années 1940-50 et source du raï actuel que se partage l'est marocain et l'ouest algérien. Aujourd'hui, le raï algérien et le chaâbi marocain ne sont plus des musiques régionales tant les deux genres sont populaires des deux côtés de la frontière.
Le premier succès personnel de Youness reste un morceau vif, marqué par des rythmes cuivrés, adoucis parfois d'accents accordéon, Pamela : « Reviens-moi ma vie/Ecoutez-moi celle que j'aime je vous l'ai laissée/Je pars en Allemagne et jusqu'en Italie ». Youness ne se contente pas de chanter mais joue de la guitare, des accords acoustiques, langoureux, maîtrisés par quatre années de conservatoire et un culte à la chanson française, qu'il démontre dans Mani nassik (je ne t'oublie pas). L'amour, les regrets et la rédemption sont attisés dans Latgoulili : « Ne me dis pas non non/Tu t'en vas et me laisses esseulé/Pardonne-moi ». Autre succès de l'artiste et autre style qui fait aussi la marque de Youness quand il mêle soul et musique marocaine et achève son album par sa dixième chanson, des vers directement sociaux, un éloge aux incorruptibles, les Knouz (trésors), ces êtres de la sincérité, humbles et respectueux qui « aspirent au bien pour tous »."

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